L'Equitation Pédagogique

pédagogie

Enseignant animateur ou enseignant technique ?

partie I - La notion de loisir
partie II - La place du jeu dans l'enseignement
partie III - Compétences dans le domaine de l'animation
partie IV - Maitrise technique : son utilité

I La Notion de loisir

La notion de loisir en équitation : ambiguïté

Le loisir, c'est le temps libre pour les distractions, ce qui nous distrait de notre vie quotidienne. Aller au cinéma nous emmène dans un autre monde le temps d'un film, pratiquer l'équitation, monter à cheval nous fait tout oublier à partir du moment où nous mettons nos bottes. Pourtant, quand les bureaucrates parlent de "loisir" en équitation, ce n'est pas cette notion de distraction qui est retenue, mais bien la façon de faire de l'équitation : équitation de loisir par opposition à équitation sportive. J'avoue ne pas bien comprendre cette différence car pour moi, que ce soit à échéance compétitive ou pour une belle promenade en forêt, pratiquer l'équitation reste dans la notion de plaisir, donc de loisir.

Cette définition de loisir ? Une pratique de bien-être et de plaisir, des moments simples et faciles, des ambitions plus que modestes comme aller se promener, une occupation.
Pourtant, on précise que le loisir, en tant que moment de plaisir, peut revêtir différentes formes, en fonction de ce que chacun cherche comme plaisir. Paradoxalement, à côté de la satisfaction du délassement, de l'amour de la nature et du contact avec l'animal, ces motivations peuvent également être le goût de l'effort, le gôut du risque, l'aventure.

On peut penser que ces derniers s'orienteront rapidement vers une équitation sportive, compétitive ou non, car cette dernière phase dépend encore du temps et de l'argent que le pratiquant peut mettre dans son loisir. De quoi parle-t-on ? Le terme "équitation de loisir" est-il opportun ? Peut-on envisager une équitation sportive sans compétition ? Peut-on avoir le loisir et le plaisir de faire de la grande gastronomie sans pour autant ouvrir un restaurant ? Toutes les équitations sont du loisir, et pratiquées correctement, ne sont-elles pas toutes sportives ?
Mais restreignons-nous donc à ces pratiquants "label loisir", dont l'activité s'oriente vers : le sentiment de sécurité, le droit à l'erreur, le droit à la peur, le contact avec l'animal, le contact affectif avant que de sombrer dans l'idée que l'équitation de loisir puisse vouloir dire "radada", "hue cocotte", et toute la gamme de comportements ignards et souvent brutaux.

Intégrer la notion de loisir dans l'enseignement : est-ce possible ?

Evidemment, l'enseignant doit prendre en compte ces motivations : c'est une règle simple d'adaptation de l'offre à la demande ! L'enseignant, mais aussi les dirigeants de club, car en fait, les enseignants sont bien peu de choses dans cette histoire de l'enseignement de l'équitation... malheureusement.

Ces différents points sont ignorés dans les clubs, où les dirigeants dirigent, où les moniteurs rêvent un temps d'idéal, où l'on continue le plus souvent d'imposer que les "clients" s'adaptent à l'offre. Abandon non pas le la pratique mais des clubs, pratique en dehors du cadre fédéral, nouveaux propriétaires non formés, une véritable pratique de loisir, elle, s'est mise en place sans que la FFE ne puisse toucher ni à ces personnes, ni à leur argent, même à grand renfort de nouveaux circuits de formation comme les "galops de pleine nature", ou de compétition comme le trec, l'équitation western ou camargue. A côté de ce constat, un autre, celui de la durée de vie moyenne d'un enseignant : 5 ans, sauf s'il a la chance de devenir dirigeant, sauf peut-être s'il a le courage de s'imposer en tant qu'indépendant.
Dans les deux cas, pratiquants et enseignants, utopistes, fuient le système fédéral.

II - La place du jeu dans l'enseignement

Activité complète, voire sérieuse, et en même temps source de plaisir, le jeu fait partie de la vie quotidienne des enfants. Des enfants, me direz-vous encore... oui, car pour des raisons de sécurité, ils pratiquent dans des clubs, bien encadrés, et sont facilement dénombrables dans les statistiques, plus que la pratique dite "sauvage" des adultes. Pour ces raisons, on pense aussi qu'ils sont plus nombreux. La réalité sur le terrain n'est pas la même que dans les fichiers...
Quoiqu'il en soit, le jeu ne "fait pas de mal" à un adulte non plus. Alors jouons !
Le jeu peut avoir plusieurs fonctions : la recherche du plaisir, la détente, le loisir, l'apprentissage, l'oubli de la peur.
Depuis que les hommes se servent des chevaux, les jeux existent, organisés : courses de chars dans l'antiquité, jeu ancêtre du polo des prairies des tartares à la chine, tournois de chevaliers, tous les jeux du continent américain issus de l'équitation western...Des jeux ou des sports, d'ailleurs ?

1970, le jeu entre dans l'enseignement

Avec l'équitation sur poneys, les jeux entrent dans les cours d'équitation : épreuves d'animations, jeux équestres, pony-games, pony-fun, equifun ...Un enfant doit jouer sous prétexte qu'un enfant qui ne joue pas ne va pas bien.
En effet, plus adapté pour les enfants, le jeu permet de motiver, interésser, rendre attentifs, réceptifs et même performants des enfants pour lesquels les cours classiques seraient ennuyeux. On peut apprendre un geste technique en jouant, avec une pédagogie ludique : une bonne mise en situation amène à réaliser le geste technique qui permet de mieux jouer. Bien sur, c'est la théorie. Faire attention à s'arrêter en utilisant son dos et ses mains correctement au lieu de tirer, pendant les jeux, c'est une autre affaire, sans parler de tourner "à l'arrache", ni des enfants hyper actifs qui ne se rendent compte ni des coups de talons, ni des coups dans la bouche qu'ils donnent.
Le jeu doit surtout être animé : la fiction symbolique est ce qui suscite l'interêt plus que les règles énoncées sérieusement.

Les objectifs

Tout le monde ne joue pas à la même chose au même âge : si un jeu se choisit en fonction d'un objectif, il se choisit également en fonction du public. Support de l'enseignement pour les moins de douze ans, on utilise les jeux individuels avec beaucoup de fabulation pour les moins de six ans, et les jeux d'équipe, de coopération pour les six - douze ans, dans lesquels la codification peut être plus importante. Quant aux adolescents et aux adultes, on leur réserve les jeux complexes, codifiés selon un système d'exigences, comme l'equifun, mais qui restent récréatifs.
L'enseignant doit évaluer l'évolution mentale des enfants et non pas toujours se fier à l'âge réel : les formes de jeu évoluent au fur et à mesure que l'enfant grandit.

Jouer pour jouer : NON !!! Le jeu est un moyen, un outil au service de l'enseignant pour amener un apport technique et faire évoluer l'élève. Hors de question d'"occuper", de passer le temps ou de faire de l'enseignant un simple surveillant de récréation à poneys.

III - Les compétences de l'enseignant dans le domaine de l'animation

En équitation, "animation" est un terme qui signifie "enseigner l'équitation à faible contenu technique". Pour ce faire, il y a eu des diplômes spéciaux comme le brevet d'animateur poney bénévole (APB), ou bien plus sérieusement car rémunéré, le brevet d'animateur poney, le BAP, qui n'est plus actuellement en vigueur. Ces diplomes permettaient d'encadrer, sous la responsabilité d'un BEES 1°, les reprises "baby poney" et les enfants du Galop 1 à 3 en pédagogie active et ludique.
Il faut savoir, premièrement, que les BEES n'encadrent jamais les autres diplomes qui le nécessitent, comme le bapaat, le cqp asa, ou encore les élèves-moniteurs, donc ces jeunes "animateurs" se débrouillent généralement seuls. Deuxièmement, les bases de la pratique sont ce qu'il y a de plus important, de mauvaises habitudes sont vite prises, difficiles à corriger, et il semble anti-pedagogique de laisser les débutant et les premiers niveaux à un enseignant "animateur". Troisièmement, encadrer des babys poneys demande une grande vigilance au niveau sécurité, c'est une activité qui ne devrait pas être confiée à des "animateurs". Mais ces problèmes, réels, n'existent pas, car théoriquement un BEES 1° encadre l'animateur qui conduit ces séances.
Pour enseigner à faible contenu technique, l'enseignant doit faire preuve d'une grande polyvalence, surtout si, à côté de ses reprises de cavaliers de compétition, il doit s'adapter aux reprises ludiques des enfants de 3/4 ans, en passant par tous les âges et tous les niveaux, avec des publics différents dont les aspirations ne sont parfois même pas homogène au sein d'une même reprise !!! Il doit également s'adapter à de nouvelles fonctions de formateur - jamais reconnues au niveau du salaire - quand il devient tuteur d'APB, de BAP, de BAPAAT ...etc.

Animer, serait-ce juste utiliser des jeux ?

Ouf, animer, c'est aussi communiquer de l'entrain à un groupe, donner de la vie à sa séance, créer une ambiance, faire participer les élèves dans des cours à contenu technique, donner sa place à chacun, bref, c'est la meilleure façon de dynamiser son enseignement. Il ne s'agit pas de créer un joyeux désordre improductif, mais une réelle émulation, un climat serein, une contagion positive. Le présence humaine, le charisme, l'honnêteté dans les relations, l'empathie de l'enseignant sont la base de cette vie, qui peut se propager en dehors de la reprise, à la vie du club par exemple : les élèves ont envie de participer aux activités supplémentaires, concours, stages, journées à thème, aux manifestations bénévoles, défilé pour un évènement, carrousel, spectacle.
Cet engouement permet de fidéliser les cavaliers, de lutter contre les formes d'abandon, d'orienter un groupe vers la coopération. Il est un facteur puissant de bonheur contagieux.

Les qualités de l'enseignant ? Il doit avoir un certain talent dans l'activité théatrale. L'imagination, ses recherches pédagogiques, son propre dynamisme sont des atouts indéniables. Adieu les enseignants qui passent leur cour assis sur leur chaise, le téléphone dans une main, un café ou la cigarette dans l'autre ! L'enseignant, doté d'une culture générale pour s'interesser à tous, doit être réellement disponible pour ses élèves qu'il ait un rôle momentané de formateur, d'enseignant ou d'animateur.

" Nantis de leur diplôme, les nouveaux moniteurs ne connaissent généralement rien à l'accueil et à l'animation. Les détails quotidiens qui font qu'un club est attirant et agréable à fréquenter leur échappent : ambiance saine et agréable, bon esprit"

IV - La maitrise technique dans l'enseignement : son utilité

La formation du BEES 1° comprend un bagage technique minimum pour enseigner du galop 1 à 7. Celle du BAP ne comprend pas un bagage technique exceptionnelle puisqu'il s'agit d'encadrer de petits niveaux, peut-on parler d'"enseigner" ? La formation renovée du BPJEPS est sensée apporter le même bagage technique que celle du BEES 1°, mais l'on voit souvent les BP se vendre comme des enseignants désireux de faire des reprises uniquement du débutant au galop 4. Pourquoi ?
Plus les niveaux des cavaliers augmentent, plus la maitrise technique est importante. L'enseignant doit avoir éprouvé un maximum de situations et avoir une conscience très étendue sur des phénomènes divers : toutes les réactions impromptues du cheval, toutes les sensations. En regardant, il ressent ce que le cavalier ressent, sait ce qu'il manque au cheval, peut traduire en données pédagogiques suffisamment claires les réponses correctes attendues du cavaliers : reflexes, automatismes, gestes conscients.
L'enseignant doit poursuivre une activité équestre, celle qu'il enseigne de préférence, même après avoir obtenu son diplôme. Toutes ses expériences personnelles, tous ses ressentis lui offrent un bagage qui facilite son enseignement.

On dit que pour les petits niveaux, l'enseignant doit faire preuve de plus de pédagogie, et d'un peu moins de maitrise technique, qu'il doit surtout savoir faire-faire, et non pas forcément savoir faire. Cela semble illogique. Une maitrise technique correcte, pas celle des BAP par exemple qui ne sont que galop 6, permet d'avoir une vision globale et de séparer le primordial de l'accessoire. Les animateurs font tout faire au même niveau, sans hierarchie, ce qui est, malheureusement, exactement ce qu'on leur demande de faire avec la pédagogie active.
Pour les niveaux élevés, la pédagogie est moins importante que la maitrise technique, maitrise technique qui comprend des savoirs théoriques et pratiques ! Plus on s'approche des niveaux élevés, plus les observations que l'on doit fournir à l'élève nécessitent des images, des références, des nuances et des descriptions différentes. L'enseignant doit également faire attention à ne pas avoir d'exigences excessives vis à vis de ses élèves, par rapport à son propre niveau, ne pas manquer de recul ou avoir un regard faussé, spécialement s'il est compétiteur de niveau national ou international.

La maitrise technique permet de :

Bref, la maitrise technique permet de proposer un vrai cours et non pas de faire de la garderie, encore faut-il savoir animer sa technique, mais n'est-ce pas ça, être pédagogue ?
Chaque enseignant ne peut être parfait dans tous les domaines, ce métier nécessite tellement de qualités que s'il les avait tous, ce serait un être humain idéal. Parfois, il arrive qu'on en trouve un bon, vraiment adapté à soi, plus rarement un excellent... Ces deux-la, surtout, quand vous les avez trouvés, gardez- les !!!

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Voir aussi :
La rénovation des diplomes
L'enseignant : artisan ou ingénieur
Définition de sport
Interet pédagogique du horse ball
La pédagogie active
Les jeux
Pédagogue